Les moyens de lutter contre la surtransposition des directives européennes dans le droit français

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Contrairement aux règlements de l’Union européenne, les directives lient les États membres quant au résultat à atteindre mais les laissent compétents pour adopter des mesures nationales de mise en œuvre. Les marges de manœuvre dont ils disposent dépendent de l’intensité normative des directives, qui peuvent procéder à une harmonisation maximale ou minimale. La surtransposition, c’est-à-dire l’adoption ou le maintien de mesures législatives ou réglementaires allant au-delà des exigences minimales d’une directive, correspond à des situations diverses : – elle peut concerner des dispositions nationales allant au-delà des dispositions d’harmonisation minimale de la directive : fixation d’un seuil plus bas ou plus élevé, d’un délai inférieur ou supérieur, d’obligations plus strictes, de sanctions non prévues par la directive...etc ; – elle peut ensuite prendre la forme d’une extension du champ d’application, personnel ou matériel, au-delà de celui prévu par la directive ; – le fait d’exercer un choix entre plusieurs options ouvertes par la directive ou de décider d’utiliser ou non les possibilités de dérogation qu’elle autorise peut également conduire à une surtransposition, dans la mesure où ces choix peuvent créer des obligations plus strictes pour les destinataires de la norme. De plus, des problématiques proches de la surtransposition peuvent se poser dans le cadre de certains règlements, pour l’application desquels les États membres disposent de marges de manœuvre. Des écarts réglementaires par rapport aux autres États membres peuvent aussi résulter de surréglementations, intervenant dans des domaines non régis par le droit de l’Union européenne ou se superposant à des réglementations européennes dans des domaines connexes. La surtransposition peut s’expliquer par un choix conscient du législateur ou du pouvoir réglementaire en faveur d’une réglementation plus ambitieuse que celle adoptée au niveau de l’Union européenne. Il s’agit souvent de situations dans lesquelles la France n’a pas réussi à faire prévaloir sa position lors des négociations. Pour les rapporteurs, de tels choix peuvent être justifiés dans des cas limités en permettant d’anticiper les enjeux d’une évolution ultérieure de la norme européenne. Elle peut également être la conséquence de certaines insuffisances du processus normatif : – un manque d’anticipation de la transposition lors des négociations, se manifestant par la déconnexion entre les équipes chargées de la négociation d’une directive et celles chargées de sa transposition et par l’utilisation insuffisante des documents permettant de préparer la transposition (fiches d’impact stratégiques et tableaux de concordance) ; – les lacunes de l’évaluation de l’impact des textes législatifs et réglementaires : les surtranspositions ne sont pas systématiquement identifiées ni justifiées et leurs conséquences économiques sont mal évaluées ; – de manière plus générale, l’inflation normative, dont la surtransposition et la surréglementation sont deux des manifestations. Les surtranspositions, comme les surréglementations, sont à l’origine d’écarts réglementaires avec les autres États membres, lesquels aboutissent, dans de très nombreux secteurs soumis à une concurrence européenne, à une perte de compétitivité pour les entreprises françaises. Il est donc essentiel que les surtranspositions soient décidées en toute conscience, transparentes et que leurs conséquences économiques soient pleinement évaluées.
Keywords: 
EU Law: Legal System & Acts, EU Democracy, Institutional & Parliamentary Law
Country of publication: 
France
File: 
Publication date: 
Thursday, December 21, 2017
Title Original Language: 
Les moyens de lutter contre la surtransposition des directives européennes dans le droit français
Abstract Original Language: 
Contrairement aux règlements de l’Union européenne, les directives lient les États membres quant au résultat à atteindre mais les laissent compétents pour adopter des mesures nationales de mise en œuvre. Les marges de manœuvre dont ils disposent dépendent de l’intensité normative des directives, qui peuvent procéder à une harmonisation maximale ou minimale. La surtransposition, c’est-à-dire l’adoption ou le maintien de mesures législatives ou réglementaires allant au-delà des exigences minimales d’une directive, correspond à des situations diverses : – elle peut concerner des dispositions nationales allant au-delà des dispositions d’harmonisation minimale de la directive : fixation d’un seuil plus bas ou plus élevé, d’un délai inférieur ou supérieur, d’obligations plus strictes, de sanctions non prévues par la directive...etc ; – elle peut ensuite prendre la forme d’une extension du champ d’application, personnel ou matériel, au-delà de celui prévu par la directive ; – le fait d’exercer un choix entre plusieurs options ouvertes par la directive ou de décider d’utiliser ou non les possibilités de dérogation qu’elle autorise peut également conduire à une surtransposition, dans la mesure où ces choix peuvent créer des obligations plus strictes pour les destinataires de la norme. De plus, des problématiques proches de la surtransposition peuvent se poser dans le cadre de certains règlements, pour l’application desquels les États membres disposent de marges de manœuvre. Des écarts réglementaires par rapport aux autres États membres peuvent aussi résulter de surréglementations, intervenant dans des domaines non régis par le droit de l’Union européenne ou se superposant à des réglementations européennes dans des domaines connexes. La surtransposition peut s’expliquer par un choix conscient du législateur ou du pouvoir réglementaire en faveur d’une réglementation plus ambitieuse que celle adoptée au niveau de l’Union européenne. Il s’agit souvent de situations dans lesquelles la France n’a pas réussi à faire prévaloir sa position lors des négociations. Pour les rapporteurs, de tels choix peuvent être justifiés dans des cas limités en permettant d’anticiper les enjeux d’une évolution ultérieure de la norme européenne. Elle peut également être la conséquence de certaines insuffisances du processus normatif : – un manque d’anticipation de la transposition lors des négociations, se manifestant par la déconnexion entre les équipes chargées de la négociation d’une directive et celles chargées de sa transposition et par l’utilisation insuffisante des documents permettant de préparer la transposition (fiches d’impact stratégiques et tableaux de concordance) ; – les lacunes de l’évaluation de l’impact des textes législatifs et réglementaires : les surtranspositions ne sont pas systématiquement identifiées ni justifiées et leurs conséquences économiques sont mal évaluées ; – de manière plus générale, l’inflation normative, dont la surtransposition et la surréglementation sont deux des manifestations. Les surtranspositions, comme les surréglementations, sont à l’origine d’écarts réglementaires avec les autres États membres, lesquels aboutissent, dans de très nombreux secteurs soumis à une concurrence européenne, à une perte de compétitivité pour les entreprises françaises. Il est donc essentiel que les surtranspositions soient décidées en toute conscience, transparentes et que leurs conséquences économiques soient pleinement évaluées.
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